Parlement de Normandie - Palais de Justice

En plein cœur de la capitale de la Seine-Maritime, l’ancien parlement de Normandie est un monument pour le moins étonnant, témoignant de la Première Renaissance architecturale à Rouen.

Pierre, mon cousin, guide conférencier en architecture, pendant les vacances m’a proposé une visite privative du très emblématique Palais de Justice de Rouen. Nous voilà donc partis vers le centre-ville, en Métro.
Descendus à l’arrêt place Foch, en premier nous décidons de faire le tour du monument puis de nous diriger vers l’entrée de la cour d’honneur. « C’est quoi tous ces trous dans les murs ? » « C’est, lors du bombardement des alliés à Rouen en 1944, le Palais de Justice va subir de très graves destructions qui prendront deux décennies de reconstruction. Tous ces impacts témoignent de la violence de cet événement. » répond Pierre.
Devant la grande grille de la cour d’honneur, nous admirons l’ensemble des bâtiments et lisons les panneaux informatifs. C’est étonnant dis-je à Pierre, on croirait une petite cathédrale ? » « Tout à fait ! ». « La grandeur du Palais de Justice est étonnante pour un édifice à caractère civil qu’on prend souvent pour un bâtiment religieux. La confusion vient du style gothique. Contemporain de l’Hôtel de Bourgtheroulde et de l’Hôtel des Finances c’est plutôt du style Louis XII, Première Renaissance en France. Les tailleurs de pierre n’ont pas encore les modèles renaissants venus d’Italie, alors ils taillent en gothique, c’est ce qui caractérise ce style. » Je me dis que j’ai de la chance d’avoir un guide en architecture, je sens que la visite va être passionnante !
Après le passage de vérification des identités on se retrouve au cœur de la cour. Pierre continue « Regarde bien les détails de la statuaire du Palais de Justice, elle a été détruite à la Révolution puis remplacée en 1836 par des représentations en costume d’époque des personnalités comme Louis XII, Anne de Bretagne, François 1er qui sont à l’origine de la construction de ce palais. Il y a aussi une allégorie de la Justice et d’autres personnages comme un laboureur, un moine, un seigneur… » J’écoute avec attention toutes ces précieuses indications et en effet c’est admirable.
Pierre a décidément le don d’aiguiser ma curiosité. « Mais c’est quand même grand ! Ils n’ont pas tout fait au Moyen-Âge ? » « C’est un moment charnière dans l’histoire car le Moyen-Âge marque une évolution vers la Renaissance, me précise Pierre. L’histoire du Palais de Justice s’étale plutôt dans le temps. En 1494, la ville construit une grande salle dite « des Procureurs ». Le roi Louis XII réforme en 1499 l’Échiquier de Normandie pour en faire une cour permanente en bâtissant une aile côté Nord qui devient ensuite le Parlement de Normandie sous François 1er en 1515. De par l’ampleur et la richesse du bâti le Palais témoigne alors de la prospérité de la ville au XVIe siècle mais également de la puissance de la Normandie. » Pierre dessine dans l’air une sorte de grand L pour désigner les bâtiments construits à cette époque. Puis il continue « Au XVIe siècle, une extension a lieu sur la partie est. Puis aux XVIIIe et XIXe siècles les bâtiments seront agrandis sur les parties Est et Ouest. Une grande grille fermera majestueusement au XIXe siècle la cour d’honneur que nous avons franchi tout à l’heure. »
Nous décidons de monter les grandes marches pour visiter l’intérieur. A l’entrée dans « la Salles des pas perdus » je ne peux réprimer un grand waouh, tellement la hauteur sous plafond est impressionnante. La salle est grandiose et la haute charpente en forme de carène de navire renversée est tout simplement bluffante. J’apprécie sincèrement la fraicheur de cette immense salle. Pierre souligne que c’est la grande Salle « des Procureurs » de style Louis XII. Il me précise que l’ensemble deviendra Palais de Justice à la Révolution.

« Hélas ! » Reprend-il « Tu ne pourras pas admirer la décoration intérieure exceptionnelle de la salle de la cour d’assisse, avec ses plafonds à caissons « Renaissance », à moins d’assister à un procès, d’être juré, ou lors des Journées du Patrimoine. » Cependant, lors des séances au correctionnel tu auras un avant-goût de la magnificence des salles, si tu veux ?
Pour nous consoler nous continuons de déambuler dans la salle des pas perdus, d’admirer les murs avec les élégantes niches sculptées en gothique qui accueillaient autrefois de belles statuaires. Le soleil est de la partie et perce les vitraux colorés des fenêtres à meneaux, c’est un spectacle multicolore qui se projette sur le sol, nous en prenons plein les yeux.
Après avoir fait résonner une dernière fois nos pas dans l’immense espace, profité de ce lieu splendide nous quittons à regret ce lieu chargé d’histoire. Au bas de l’escalier, Pierre m’annonce qu’il me réserve une surprise, très impatiente, je me demande ce que cela peut-être ? Il se dirige sur la gauche du grand escalier central de la cour d’honneur. Là sous l’escalier me dit-il, il y a « La Maison Sublime », ouverte à la visite tout récemment. Curieuse de ce lieu que je ne connais pas, je lui propose de nous programmer une prochaine sortie. Top là !
En attendant, si nous allions compléter cette visite sur le style Louis XII avec l’ancien Hôtel des Finances, face à la Cathédrale de Rouen ?