Chapelle Saint-Julien

La Vallée de la Seine possède une richesse de patrimoines médiévaux insoupçonnés : abbayes et églises, châteaux et manoirs, aîtres… parmi lesquels la chapelle Saint-Julien située au Petit-Quevilly, dans l’agglomération de Rouen, tient toute sa place et ses promesses de visites impressionnantes ! Joyau d’architecture ou les arts Roman et Gothique se mélangent harmonieusement, l’édifice propose de merveilleuses peintures murales, conservées dans un état exceptionnel et qui donnent à ce lieu toute sa magnificence.

Je partage une passion pour le patrimoine médiéval depuis mes très jeunes années. C’est peut-être « l’effet château de princesse » ! En tout cas je me remplis les yeux de merveilles dès que je le peux. Pierre, archéologue, le sait bien et me propose d’aller un samedi visiter la chapelle Saint-Julien près des Chartreux à Petit-Quevilly. « C’est un monument unique du XIIe siècle de l’art roman normand, parvenu jusqu’à nous dans son intégralité » me dit-il, « avec des peintures murales exceptionnelles ». Curieuse d’en savoir davantage sur cette pépite, nous nous donnons rendez-vous pour le samedi suivant.

J’ai pris un peu d’avance sur l’horaire de notre rendez-vous. En arrivant, je découvre cachée dans un écrin de verdure une grande esplanade blanche et face à moi, la chapelle Saint-Julien, qui semble être une belle endormie. Tout de suite, je repère le subtil aménagement de la place avec mobilier moderne en acier cortex. En attendant l’arrivée de Pierre, je profite du panneau historique sur la chapelle pour en savoir davantage. Je commence par lire « La chapelle du Roi Henri II » puis « La chapelle et ses trésors sauvés ». Grâce à toutes ces informations, je serai incollable pour visiter ce superbe édifice religieux !
A peine ai-je fini que j’entends qu’on m’appelle. C’est lui ! Sans plus attendre nous nous dirigeons vers la belle porte en bois pour rentrer dans le sanctuaire. La façade, très sobre, présente un portail sculpté en triple colonnades et trois ouvertures qui font allusion à la trinité chrétienne.

Dès notre entrée, notre regard saisit la totalité de l’espace et l’harmonie des volumes tout comme la beauté de la pierre taillée. Nos narines sont titillées par l’odeur typique que distille la fraicheur des murs. La nef possède une belle charpente avec une grande voute en bois. Les latéraux, qui font le tour intérieur de la Chapelle, présentent des arcades en plein cintre avec des colonnes dont les chapiteaux sont une merveille de sculpture. Décidément Pierre a eu une excellente idée de m’inviter à découvrir cette adorable chapelle ! Nous ne savons pas où poser les yeux, tellement il y a à observer. Cet ensemble harmonieux est typique du style roman. La voute à croisée d’ogives du chœur marque l’évolution vers le gothique. En levant les yeux vers la voute du chœur, nous découvrons les merveilleuses peintures murales des XIIe et XIIIe siècles. « Ces peintures en médaillons ont été réalisées par des artistes venus d’Angleterre », m’indique Pierre. Elles sont comparables aux enluminures de la seconde école de Winchester, proche de l’art byzantin. Les dessins sont expressifs, des lignes délicates avec une décoration florale élégante entourant les scènes de l’enfance du Christ. C’est sincèrement exceptionnel !

La chapelle qui fait un peu plus de 50m2, est dédiée à la Vierge Marie et s’appelait autrefois Notre-Dame. Sa construction commence entre 1150 et 1160 par Henri II Plantagenêt, Duc de Normandie et roi d’Angleterre, pour compléter son manoir ducal du domaine de chasse de la forêt du Rouvray. Elle est transformée en léproserie de 1183 à 1366. La Chapelle deviendra ensuite une maison de santé puis un entrepôt.
Si nous pouvons admirer ce joyau médiéval aujourd’hui, c’est qu’elle échappe aux destructions de la Révolution, là où nombre d’édifices disparaitront ou bien finiront en ruines. Elle retrouve sa fonction cultuelle à partir de 1843 et ceci jusqu’en 1960. Puis elle sera classée en 1869 aux Monuments historiques. Plusieurs restaurations auront lieu en 1895, 1960 et 1983.

Quand nous ressortons, je suis un peu triste de quitter cet atmosphère pleine de sérénité propice à la méditation, au recueillement. Pierre me propose de faire le tour de la chapelle. J’accepte volontiers, tant j’ai mal à m’extraire de ce bel endroit. « Ne t’inquiète pas » me dit-il, « on reviendra régulièrement si tu le souhaites pour écouter des concerts de musique de chambre, où tu profiteras de l’acoustique du lieu. Sinon nous pourrons venir découvrir les expositions d’art contemporain, des artistes européens ou locaux ». Je suis plus que partante pour revenir vivre des instants de bon dans ce lieu époustouflant. Je remercie mon ami pour cette découverte et m’empresse de lui demander :
- « A quand la prochaine ? ».
- « Dès que tu es libre ! » me répond-il.